La septième rencontre du G20 s’est déroulée les 18 et 19 juin, à Los Cabos, sur la côte Pacifique du Mexique. C’est en 2008, à Washington, que ce sont réunis pour la première fois les vingt chefs d’Etat et de gouvernement pressés de répondre à la crise des « subprimes ». Mais à quoi sert ce forum où les dirigeants des principales puissances économiques de la planète discutent de sujets aussi nombreux que variés, et comment fonctionne-t-il ?
Les rencontres du G20 offrent l’occasion aux dirigeants de 29 Etats, dont 10 invités, auxquels s’ajoutent l’Union européenne et plusieurs organisations internationales, de confronter leurs points de vue sur les grands problèmes internationaux, en particulier dans le domaine économique. Pourtant, le G20 se contente d’exprimer le résultat de réunions préparatoires dans un document consensuel et déclaratoire. A l’origine, seuls sept Etats occidentaux initièrent ces rencontres destinées à coordonner les politiques économiques des participants, et à répondre de manière concertée aux tensions et aux crises.
Du G7 au G20 : un élargissement aux poids lourds de l’économie mondialisée
C’est en 1975, sous l’impulsion du président français, Valéry Giscard d’Estaing, et d’Helmut Schmidt, le chancelier allemand, que se réunit le premier G7. Il s’agit alors de créer, dans un cadre restreint, une plate-forme de dialogue entre les dirigeants des sept premières puissances économiques mondiales permettant de traiter des grandes questions économiques et financières en s’affranchissant des lourdeurs des instances multilatérales comptant pléthores de pays et de revendications. Le G7 compte alors l’Allemagne, le Canada, les Etats-Unis, la France, le Japon, l’Italie et le Royaume-Uni. Ce « club de riches », comme il est baptisé par ses détracteurs, correspond à sa formation strictement occidentale.
Le premier signe d’ouverture apparaît dès 1978, avec l’intégration de la Russie (URSS) pour aboutir arithmétiquement au G8. En même temps, cela induit de la part de Moscou de discuter économie de marché à l’échelle planétaire et, à terme, d’en accepter les règles. Il faut noter que le G8 continue à se réunir préalablement au G20, par exemple en mai 2012, à Camp David.
Il faut attendre 1999 pour qu’un nouvel élargissement ait lieu, à l’initiative de Paul Martin, le ministre des finances du Canada, qui plaide et obtient la participation de pays émergents. Ce sont d’abord l’Afrique du Sud, le Brésil, la Chine, l’Inde, le Mexique, qui sont invités à siéger avec leurs pairs, ensuite, l’Arabie séoudite, l’Argentine, l’Australie, la Corée du Sud, l’Indonésie, la Turquie et l’Union européenne, pour arriver à vingt participants, auxquels s’ajoutent encore de nombreuses organisations multilatérales dont les institutions financières internationales.
Si les membres du G20 représentent entre 80 et 90% de la richesse mondiale, conscients des frustrations des pays tenus à l’écart de leurs rencontres, ils invitent d’autres partenaires à se joindre à eux, de manière tournante et suivant un répartition géographique équitable. Ainsi, en 2012, dix Etats supplémentaires ont participé aux discussions (Algérie, Azerbaïdjan, Bénin, Cambodge, Chili, Colombie, Emirats arabes unis, Espagne, Norvège, Singapour).
La première formule de ces rencontres rassemble les ministres des finances et les gouverneurs des banques centrales. A partir de 2008, à Washington, ceux-ci font place aux chefs d’Etat et de gouvernement bien décidés à éviter le naufrage de l’économie mondiale suite à l’éclatement de la bulle immobilière aux Etats-Unis. En 2009, le G20 se réunit deux fois, à Londres, en mars, puis à Pittsburgh, en octobre. Face à l’urgence, les plans de relance et le sauvetage des banques font consensus. En 2010, l’incendie semble maîtrisé : les sommets de Toronto et de Séoul en font les frais, laissant ressurgir les traditionnelles crispations entre les Etats-Unis et la Chine (RPC), les pays émergents et l’Occident.
Les balbutiements d’une gouvernance périodique aux effets relatifs
Chaque rencontre est présidée par l’Etat hôte suivant le principe d’une présidence annuelle. En 2011, la France accueillait le sommet à Cannes. En 2013, ce sera au tour de la Russie, puis de l’Australie en 2014, et de la Turquie l’année suivante. Pour sa part, le G20 de Los Cabos aura sans doute souffert du calendrier électoral mexicain : en effet, le gouvernement est sur le départ puisque les élections présidentielles et législatives se tiendront le 1er juillet.
Ne disposant ni d’un secrétariat permanent ni d’un budget propre, depuis 2011, les travaux du G20 sont conduits sous l’autorité d’une troïka composée par les présidences précédente, présente et suivante du sommet (en 2012, la France, le Mexique et la Russie). Les sujets sont répartis entre les pays sur base du volontariat. Les débats s’étalent sur plusieurs mois (une année au plus) au cours de réunions successives. Chaque groupe de travail thématique rédige alors un texte destiné à être intégré dans le communiqué final qui intervient à la clôture de la rencontre des chefs d’Etat et de gouvernement.
Au G20, le processus décisionnel dépend de la règle du consensus, ce qui explique, par exemple, que la question récurrente de la création d’une taxe sur les transactions financières, honnie notamment par les Etats-Unis et le Royaume-Uni, ne figure pas dans la déclaration finale du sommet de Los Cabos. Mais les décisions du G20 n’ont aucune valeur contraignante sur le plan juridique, en d’autres termes elles ne valent pas engagement de la part des participants. A cet égard, il convient de noter qu’en l’absence de budget, le financement de certains projets dont l’initiative relève du forum (par exemple, les onze projets d’infrastructures décidés à Cannes) nécessite le soutien ultérieur de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international (FMI), de banques de développement ou d’investisseurs privés. En définitive, la concrétisation des décisions relevant du G20 dépend de la volonté politique des participants les plus directement intéressés.
L’intérêt de ces rencontres tient dans le dialogue et l’échange entre les participants qui peuvent apprécier les préoccupations des uns et des autres. C’est pourquoi les thématiques abordées peuvent être très variées dans les domaines économiques, financiers, environnementaux et sociaux (renforcement des moyens des institutions financières internationales et de leur gouvernance, amélioration des règles prudentielles en matière bancaire, lutte contre le réchauffement climatique, volatilité des prix de l’énergie et des matières agricoles, financement du développement, outils favorisant une croissance forte et durable, etc.).
De l’avis général, le sommet des Vingt de juin 2012, s’est révélé décevant. Les difficultés financières de l’Europe et leur incidence sur l’économie mondiale, auront été au premier rang des discussions. De manière schématique – et sans prétendre à l’exhaustivité –, le communiqué final des Vingt a énoncé les priorités suivantes :
- soutien de la croissance, notamment par le levier de la demande ;
- nécessité d’assurer la stabilité financière ;
- refus du protectionnisme ;
- sécurité énergétique ;
- fluctuation « naturelle » des taux de change.
Ainsi, les participants ont suivi les recommandations répétées inlassablement par le FMI, une recette classique dont les résultats ont souvent été mitigés par le passé : assainissement des comptes publics et soutien de la demande. Cela peut-il être suffisant pour relancer la croissance et quelles peuvent être les répercussions économiques et sociales de cette méthode ?
Les divergences demeurent de taille entre les Vingt qui n’ont pas réussi à trouver d’accord afin de faire figurer dans le communiqué final des questions aussi cruciales que la sécurité alimentaire, les incidences négatives des agro-carburants ou la taxe sur les transactions financières précitée. Finalement, les ONG présentes au G20 ont reconnu une avancée, puisque la déclaration des Vingt a intégré un appel à la coopération fiscale internationale. Une avancée certes, si cet appel se concrétise à l’avenir par de véritables accords de coopération.
Chronologie des sommets du G20 au niveau des chefs d’Etat et de gouvernement :
- Washington (Etats-Unis), 15 novembre 2008 ;
- Londres (Royaume-Uni), 2 avril 2009 ;
- Pittsburgh (Etats-Unis), 24-25 septembre 2009 ;
- Toronto (Canada), 26-27 juin 2010 ;
- Séoul (Corée du Sud), 11-12 novembre 2010 ;
- Cannes (France), 3-4 novembre 2011 ;
- Los Cabos (Mexique), 18-19 juin 2012.
Hubert Fabre est chercheur associé à l’Institut Européen des Relations Internationales (IERI)
Il est l’auteur du livre:
L’usage de la force dans l’espace : réglementation et prévention d’une guerre en orbite
paru en 2012 chez Bruylant (Bruxelles).
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