Bilan raisonné
À Moscou s'est déroulée les 23 et 24 Mai derniers la troisième conférence internationale sur le thème de la sécurité, organisée par le Ministère russe de la Défense avec l'intervention d'ouverture de son Ministre Anatoly Antonov, du Ministre des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, suivies par celle du Général Valery Guerassimov, Chef de l'État-Major général et vice ministre de la défense.
Cet événement a réuni environ 500 représentants officiels des pays asiatiques, européens, africains et latino-américains , des représentants des grandes organisations internationales (ONU, OSCE, OTCS) et de Think-tanks de différents pays, dont l'Institut Européen des Relations Internationales de Bruxelles (IERI). Se sont exprimés à tour de rôle à la tribune plusieurs ministres de la Défense et plusieurs Chefs d’État-major des armées, en apportant des analyses géopolitiques et socio-stratégiques particulièrement argumentées. Dans le débat sont également intervenues des personnalités extérieures américaines, otaniennes et européennes1.
Le colloque a débuté par un tour d'horizon approfondi des différentes zones critiques de la planète, avec une attention particulière aux rapports de force stratégiques et militaires en leur présentation visuelle, accompagnés de commentaires sur les identités politiques et stratégiques des acteurs étatiques et des actants militaires (forces exotiques, trans- et sub-étatiques). Par ailleurs, un examen historique a été consacré aux « révolutions de couleurs » en leurs répercussions sur la géopolitique européenne et eurasienne.
La partie la plus utile, pour des observateurs professionnels et pour des spécialistes des rapports internationaux et stratégiques, a été la présentation des cadres compartimentés des différents théâtres de conflit. Le fil conducteur des analyses régionales a été représenté par la dialectique terrorisme/antiterrorisme avec une attention particulière aux phénomènes de déstabilisation et de désagrégation sociales et un rappel de fond sur les trafics de drogue et leurs répercussions.
Les interventions les plus remarquées ont été celles à caractère général et à plus grande étendue et profondeur stratégiques, impliquant des analyses sur les interventions directes ou indirectes des grandes puissances. La fragmentation des théâtres et la focalisation sur les intérêts régionaux ont représenté des avantages cognitifs et informationnels significatifs. Des limites épistémologiques sont apparues en raison d'une carence d'analyse globale de la sécurité à appréhender en termes de multipolarité.
En effet, nous entendons par analyse multipolaire l'analyse générale de la conjoncture et la logique unifiante des stratégies globales des grandes puissances dans leurs relations réciproques ou croisées, de type coopératif et/ou conflictuel.
Le terrorisme international ne représente pas en effet, ni théoriquement, ni politiquement, un facteur de cohésion suffisant pour saisir l'importance des engagements des grandes puissances en leurs alliances ou coalitions, comme l'affirmait déjà Brzeziński en 1997.
La conférence a montré l'importance et la pertinence de ce type de réunion sur le plan géopolitique et stratégique. Elle aurait gagné en signification si elle avait impliqué une analyse impliquant une approche davantage ciblée sur les deux triangles déterminants du système international : les relations Russie-USA-UE dans l'hémisphère nord et les relations USA-Russie-Chine, analysées sous l'aspect de la rivalité stratégique et hégémonique à l'échelle mondiale. Il nous semble opportun qu'un prolongement et un complément politique et stratégique de ce colloque puissent avoir lieu à l'avenir.
Il serait utile à terme, de prendre également en considération la sécurité globale comme linkage stratégique et interdépendance croisée des aspects politico-militaires et socio-économiques, tant à l'intérieur de la logique de rivalité Est-Ouest et que de la relation d'influence Nord-Sud.
La conférence a été suivie d'une démonstration de performance de véhicules armés « TANK BIATHLON-2014 » qui s'est déroulée près de Moscou et a comporté des évolutions et des manœuvres en posture d'attaque, de défensive et de tirs tous azimut.
1 Représentations participantes : Afghanistan, Algérie, Allemagne, Arménie, Autriche, Azerbaïdjan, Bélarus, Belgique, Canada, Chine, Égypte, Émirats Arabes Unis, Espagne, France, Inde, Iran, Israël, Italie, Kazakhstan, Kirghizstan Liban, Libye, Monténégro, Myanmar, Norvège, Ouzbékistan, Pakistan, Serbie, Suisse, Syrie, Tadjikistan, Turkménistan, Turquie, USA, Communauté des Etats Indépendants, Organisation de Coopération de Shanghai, Organisation du Traité de Sécurité Collective, Ligue Arabe, Nations Unies.