Souveraineté, sécurité et défense à l'origine de la Realpolitik
Auteur:
Irnerio Seminatore
Date de publication:
1/7/2013
Cet article correspond au discours prononcé par le Professeur Irnerio Seminatore lors de la soirée de clôture de l'Academia Diplomatica Europaea qui s'est tenu le 25 juin dernier, à l'Institut Italien de Culture de Bruxelles
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MACHIAVEL, L'UTOPIE ET L'ÉTAT MODERNE
La naissance de la pensée politique moderne, rationaliste et réaliste, porte le nom de Niccolò Machiavelli. Cette pensée reflète les mutations fondamentales qui transformèrent l'Europe du XVIe au XVIIIe siècle et qui ouvrirent des nouvelles prospectives à la manière par laquelle les hommes réfléchissent à la chose politique. Celle-ci est désormais une activité sécularisée inspirée par la logique des intérêts plutôt que par celle d'une vérité ou d'une valeur, métaphysique ou morale.
Elle marque l'émergence de l'État moderne, du réalisme politique et de la souveraineté absolue. Depuis Machiavel, la doctrine de l'État et la tradition du réalisme embrassent toute entière l'Histoire occidentale car elles font corps unique avec le concept moderne de souveraineté, comme soumission à une autorité absolue indivisible et inconditionnelle . C'est ce qu'on appellera plus tard la doctrine de la « Raison d'État », comme conception de la puissance internationale et interprétation calculée et rationnelle des intérêts nationaux.
La doctrine de Machiavel a un fondement idéologique et une justification prospective. Elle est empreinte de la force entraînante d'une utopie armée et de la séduction d'un dessein politique porté par le Sujet maître du politique, le Sujet Prince. Elle débouche enfin sur une théorie de la volonté et du pouvoir d'État. Or l'antinomie entre l'utopie et la realpolitik n'arrivera pas à résoudre le caractère irréconciliable de ces deux philosophies contradictoires, l'utopie comme quête idéaliste de nouveaux horizons politiques et la Realpolitik, comme rappel de la réversibilité des conquêtes humaines. En effet, toutes les révolutions se feront au nom de l'utopie et toutes les restaurations au nom du réalisme.