SYSTEMIQUE, VOUS AVEZ DIT SYSTEMIQUE ?

Auteur: 
Jacques LIPPERT
Date de publication: 
2/11/2011

Enfin, peu avant de quitter ses fonctions Jean-Claude Trichet nous livre sa dernière analyse: la crise est systémique! Comprenez qu’à force d’hésitations, d’atermoiements, de décisions tardives et inappropriées, de discours tantôt lénifiants, tantôt alarmistes et bien d’autres erreurs et manquements, la crise grecque politiquement maitrisable à l’origine est devenue une crise de l’euro et de l’Union. David Cameron l’a bien résumé: « A little bit too little, a little bit too late ».

Les explications et les recettes les plus contradictoires, parfois farfelues, s’affrontent émises dans tous les milieux qualifiés ou qui croient l’être. Rarement le bon sens prévaut chez ceux qi nous disent « y’a ka », et qui en général proposent « la mesure » qui résoudra « le problème », sans envisager ce que Raymond Barre appelait les effets pervers inhérents à toute mesure si bonne soit-elle dans ses intentions. Achetez la dernière version de notre logiciel… et tous vos problèmes seront résolus! En ne traitant le patient grec qu’avec des moyens de techniques financières, on a évacué mais aussi aggravé la nature profondément politique de la crise. Crise de l’évolution sociale et politique de l’Europe dans ses profondeurs: la mondialisation commerciale et surtout de l’ingénierie financière, adoptée comme un dogme par l’UE (liberté de circulation des marchandises - marché commun puis unique - des capitaux et des hommes) s’est illustrée plus par ses effets pervers que par ses bienfaits. La circulation des marchandises s’est surtout traduite par l’émigration des entreprises et la destruction du tissu industriel européen et de son infrastructure financière et technico-sociale, l’accumulation capitalistique passant progressivement entre les mains des émergents. Arcelor-Mittal est à cet égard un cas d’école. L’Allemagne a échappé à ce processus grâce à un tissu industriel diversifié (des TGE aux PMI), une exigence de qualité dans les filières professionnelles et une vigilance juridique efficace (Cour de Karlsruhe).Contrairement aux Etats-Unis, la circulation des travailleurs s’est révélée négligeable, à l’exception du flux Est-Ouest. L’Espagne cumule ainsi l’éclatement de la bulle immobilière, la crise financière et bancaire (actifs portugais et grecs) avec un excédent de plus de 800 000 travailleurs roumains, insupportable poids sur les comptes sociaux et pour lesquels elle doit demander à l’UE le rétablissement des permis de séjour.

La concurrence libre et non faussée, naïvement assimilée par les théoriciens des Institutions Européennes à une mythique concurrence parfaite, a été détournée de son but par des financiers irresponsables, y compris envers leurs actionnaires. L’Euro a supprimé la monnaie comme variable d’ajustement de la compétition. La fiscalité reste un élément du choix des investisseurs, mais le facteur principal est pour eux la réduction de la masse salariale et des prélèvements sociaux, c'est-à-dire de la dépense publique sous la menace de la dégradation de la note. Ainsi la crise prend sa dimension économique par l’assèchement du crédit, sociale par la compression des revenus salariaux, sociétale par le doute moral et l’incertitude, politique par l’impuissance des élus et des élites, mondiale par le ralentissement du commerce international de l’Occident. Affranchi de toute régulation par l’abolissement des « lois keynésiennes », le secteur financier s’est lancé dans des prêts de plus en plus risqués d’une part, plombant les bilans de produits dits toxiques, dont certains issus d’une mathématisation des produits qui échappent à l’entendement des dirigeants, et d’autre part de crédits immobiliers sans garanties suffisantes. Ainsi s’est créée une dette à trois niveaux : les ménages, les banques et les dettes souveraines. Ces dernières bien que toutes exprimées en Euro ne sont pas appréciées au même niveau par les acquéreurs et les « noteurs » entraînant des distorsions de taux d’intérêt insupportables dans une zone monétaire unique, et la suspicion d’un défaut de paiement d’un ou plusieurs Etats membres de la zone euro pouvant aboutir à une fracture de la zone par expulsion ou par retrait. Ce scénario résulterait de l’hétérogénéité économique de la zone que les critiques de l’euro avaient soulignés dès le départ. Les 17 Etats ont remis leur droit régalien sur la monnaie entre les mains d’une BCE technocratique qui n’est pas gouvernée par une autorité politique définie et ferme. Aujourd’hui nous sommes toujours dans l’inaction ou l’annonce d’actions qui ne se traduisent pas en actes et qui font ressortir l’inadaptation de la méthode intergouvernementale dans un domaine qui requiert vision claire, autorité, fermeté, cohérence et rapidité dans la décision et dans sa mise en œuvre. Le crédit est une opération de mise à disposition de fonds qui requiert confiance et responsabilité de la part du prêteur et de l’emprunteur. Or, on a vu des villes ou des régions contracter des emprunts dont le taux d’intérêt est indexé sur des impondérables comme le cours du yen ou du franc suisse ou encore le prix du gaz. La crise prend alors une dimension éthique. Les aides de 2008 ont été dépensées entre dividendes et bonus sans reconstitution significative des fonds propres, car les banquiers rechignent à appliquer les critères de Bale 2. Dexia, qui n’est qu’un début, dont le bilan pèse 500 Mds€ est nationalisée par l’Etat belge avec 14Mrds, parce que sa capitalisation boursière est proche de zéro. Une bonne part de l’indécision des responsables européens tient dans la peur qu’une recapitalisation massive des banques n’entraine une spirale infernale: alourdissement de la dette, nouvelle dégradation de la note, chute de la croissance etc.

Quelle que soit l’issue de cette crise, on peut discerner des tendances qui modifieront profondément l’Europe, sa société et ses Institutions.

LA FIN DU COMPROMIS SOCIAL-DEMOCRATE ET DE L’ETAT PROVIDENCE.

Ceux-ci avaient été instaurés en 1945 dans le but de consolider la reconstruction, de reconnaitre la contribution des peuples occupés à la Victoire. Ils reflétaient les idéaux de la Résistance et la résolution de détourner ces peuples de l’attrait d’un communisme alors puissant en Europe. Sa chute à l’Est ouvrit grand la porte aux théories de l’Ecole de Chicago et à sa doctrine du choc, dont les petits soldats, le FMI et la Banque Mondiale furent les hérauts en Russie, au Chili, en Argentine, en Irak etc. dans la mise en place du capitalisme néolibéral. En Europe les arguments ne manquent pas pour justifier le détricotage de ce filet de protection sociale: les impératifs de la compétitivité, la loi de la concurrence dite non faussée, la pression sur la productivité du travailleur par l’automatisation des tâches, la modération salariale, variable d’ajustement des coûts et des prix dans une zone monétaire unique, la flexibilité du marché du travail, le gel des salaires en échange de la garantie de l’emploi, l’immigration massive comme moyen de pression sur les salaires et les conditions de travail (ex : l’Espagne et ses 800 000 Roumains). Le principe du monopole de la Sécurité Sociale et de son caractère obligatoire a été battu en brèche par une Directive de la Commission transposée en juillet 1993 dans le droit français (Balladur) et que personne n’ose appliquer y compris les compagnies d’assurances. La stagnation démographique de l’Europe couplée au vieillissement de la population justifiera l’allongement des carrières avec le relèvement des cotisations et la diminution des prestations. Un membre important du MEDEF a déclaré : « Nous allons défaire ce qu’a fait le Conseil National de la Résistance en 1945 ». Cette phrase fait écho à celle d’Herman Van Rompuy ce dimanche 23 octobre au cœur de la crise: « Il faut rassurer les investisseurs ». Ainsi les dirigeants européens plieront devant les exigences des marchés, et les citoyens paieront le prix de la flexisécurité exigée par le patronat européen. On parle « salaire poche », c'est-à-dire: on vous restitue l’équivalent de vos cotisations sociales et vous choisissez votre assurance sociale privée. Quelle que soit l’issue de la crise, c’est une tendance « lourde », et il y aura une Europe fiscale et budgétaire avant toute Europe sociale.

 LA FIN DE LA GOUVERNANCE ECONOMIQUE EN TANT QUE PARADIGME EUROPEEN

Celui-ci a vécu en tant que méthode de coordination intergouvernemental tout aussi inefficace, que la méthode ouverte de coordination (MOC) mise au point par J.DELORS dans le cadre de la Stratégie de Lisbonne qui aurait du aboutir en 2010 à l’Europe de la connaissance et de l’excellence. Ainsi pour respecter la co-décision il a fallu trois mois pour obtenir l’accord de 17 Parlements sur un contenu totalement dépassé (avec un épisode burlesque et scandaleux en Slovaquie). La démocratie représentative s’en trouve dangereusement discréditée, non seulement au niveau national, mais aussi européen. La contrainte du réel a fait voler en éclats le dogme: « pas de soutien aux Euros-Etats défaillants, pas de transferts financiers dans la zone Euro », qui excluait toute budgétisation et solidarité européenne. L’hétérogénéité économique (Sud-Nord) de la zone Euro couplée à une forte interdépendance monétaire dans un contexte d’absence d’autorité politique a fait éclater au grand jour l’erreur conceptuelle initiale: céder un droit souverain, c’est-à dire régalien -battre monnaie- à une structure technocratique qui ne le possède pas et qui face à la nécessité s’est engagée au-delà de sa mission à racheter de la dette souveraine des Etats en difficulté qui figure à son bilan, ce qui ne rassure guère les « marchés ». Tout au plus la BCE a-t-elle pu limiter la casse sur les dettes italiennes et portugaises, le rôle de la Banque relevant essentiellement de la technique monétaire. Comme Jean-François Jamet l’a exprimé dans un article récent (Fondation Robert Schuman) : « l’Europe fait en réalité face à un dilemme: elle est en effet dans une situation où coexiste une forte interdépendance et d’importantes divergences. Or la théorie n’a pas de solution claire pour une telle situation, ce qui explique les nombreux désaccords au sein de la communauté des économistes et des politologues ». L’embarras est tout aussi perceptible au niveau des décideurs notamment José Manuel Barroso et Herman Van Rompuy qui pour des raisons diverses ont du mal à trancher le nœud gordien. Dès lors cette tâche échoie au président Sarkozy et à la chancelière Angela Merkel, tout deux face à de proches échéances électorales. Cette situation, en fait un condominium franco-allemand, ne peut durer aux yeux des autres partenaires européens que dans un contexte de crise. L’Allemagne plus puissant pays européen souffre d’un complexe qui ne lui permettrait pas d’affronter une éventuelle inflation qui serait le produit des décisions prises. Cette appréhension est au cœur de la mémoire collective allemande, à moins de surmonter ce complexe elle interdirait toute solution de la crise qui passerait par une monétisation (planche à billets). Diminuer l’interdépendance des pays de la zone euro soit par une exclusion soit par un retrait risquerait de compromettre à terme l’avenir de celle-ci et introduirait en pratique au mieux une Europe à deux vitesses au pire « deux Europe ». Renforcer l’interdépendance serait au contraire ce que réclament ceux qui veulent plus d’Europe, ce qui se traduirait par la mise en place de budgets européens, supervisés par l’une ou l’autre Institutions soit la Commission soit le Conseil, et contrôlés par le Parlement Européen et bien entendu les parlements nationaux selon une procédure rapide. Ce serait un pas vers l’intégration politique qui nécessiterait rapidité et volonté dans la décision, or en temps de crise il faut trancher très vite ce qui veut dire aplanir les divergences et resserrer les interdépendances. Il faut donc passer du flou de la gouvernance à la force et l’autorité d’un gouvernement économique européen. L’idéal serait d’arriver, comme en matière de commerce extérieur à représenter la position de l’Europe par un Commissaire ayant pouvoir en la matière après concertation avec les Etats membres. Ceci pourrait nécessiter l’abandon de la règle de l’unanimité dont on a vu les effets pervers lors de l’actuelle crise. Comme le dit Jean-François Jamet : « les règles budgétaires et les politiques de coordination économiques des Etats membres ont perdu toute crédibilité, soit parce qu’elles n’ont pas été appliquées comme par exemple les règles budgétaires du Pacte de stabilité et de croissance, soit parce que les outils institutionnels correspondants étaient inadaptés à une situation de crise ». Comme en d’autres matières et surtout en politique, l’Europe n’est forte que de son maillon le plus faible. La faiblesse économique et la manque de rigueur budgétaire de la Grèce a introduit une incertitude politique sur l’avenir de l’Union européenne. L’impossible élaboration en urgence d’une stratégie politique de sortie de la crise a aggravé le sentiment d’impuissance des dirigeants perçu par les investisseurs cités par M. Van Rompuy. Comme l’a dit Jean-Louis Bourlange, l’Europe si elle veut survivre n’échappera pas à une réforme institutionnelle qui devra éliminer les effets pervers de l’actuel système. Si l’intégration économique et budgétaire s’avérait impossible, on aurait une Europe limitée à un marché unique et dépourvue d’outils politiques coercitifs, l’Europe de Tony Blair «  I want Europe a super power but not a super State ».

LA DECONNEXION DU MONDE FINANCIER DE L’ECONOMIE REELLE

Les dirigeants d’entreprise seraient irresponsables si actuellement ils n’envisageaient tous les scénarios possibles et notamment ceux qui pourraient être les plus préjudiciables à la pérennité des entreprises.

Celles-ci ont mis à profit les années qui ont suivies la crise de 2008 non seulement pour assainir leur bilan et restructurer leurs opérations mais également pour dégager des chiffres d’affaires (malgré la crise) en recherchant de nouveaux marchés, des marges bénéficiaires et des distributions de dividendes revenus au niveau d’avant 2008. Elles sont structurellement prêtes pour la sortie de crise en cas d’issue positive.

Le premier souci sera le financement de leurs activités. Or les capitalisations en bourse sont faibles et les investisseurs réticents. Ils devront donc s’adresser au réseau bancaire, mais ils craignent que celui-ci n’utilise les fonds publics pour renforcer leurs fonds propres plutôt que d’accorder du crédit. Rappelons ici qu’en 2008 une bonne part des refinancements des banques ont été à la distribution de dividendes et de bonus plutôt qu’au circuit du crédit. Il y a déjà des exemples : une firme allemande Frantz Electrolyse, cité par The Economist, fournisseur clé de Peugeot et de Renault, a trouvé du financement chez Total en échange de l’utilisation exclusive d’un produit chimique de Total. L’hebdomadaire cite d’ailleurs d’autres cas qui montrent qu’un resserrement du crédit est possible en Europe, risquant d’entrainer de nouvelles délocalisations de sièges sociaux afin de bénéficier de financements dans d’autres zones monétaires.

Le second souci, qui est la crainte d’un éclatement de la zone euro, a déjà amené certains dirigeants à prendre des mesures conservatoires. Soit en prévision d’une crise bancaire prolongée, comme par exemple Siemens qui selon le Financial Times a retiré 500 millions d’euros de la Société Générale à Paris pour le placer à la BCE ! Soit d’autres qui cherchent à réduire leur présence dans les pays fragiles de la zone euro, comme par exemple Telefónica qui annonçait en septembre qu’il consoliderait désormais son chiffre d’affaire espagnol dans les résultats de son quartier général de Londres. D’autres entreprises préfèrent envisager les pays émergents comme centre de certaines de leurs activités.

Si ces mouvements s’amplifiaient on pourrait en redouter les conséquences sociales, fiscales et même politiques.

L’EMERGENCE DES PEUPLES

Les Indignados de la Puerta del Sol, les Protesteurs de Wall Street et différents mouvements en Europe font penser aux manifestations anti-mondialistes du début des années 2000. Il y a néanmoins deux différences remarquables et une similarité. La première différence tient à l’organisation. Les anti-mondialistes étaient structurés dans différents mouvements par exemple, Attac, et recevaient des directives relativement précises. Ils organisaient des « sommets » qui se voulaient géographiquement basés dans les pays émergents en réponse au World Forum de Davos. Il y avait dans chaque mouvement des leaders clairement identifiés comme par exemple Bernard Cassen chez Attac. Les nouveaux mouvements se retrouvent en un lieu déterminé par le biais de réseaux sociaux et l’utilisation des nouveaux moyens de télécommunications, qui donnent à ces regroupements un aspect spontané.

La seconde différence réside dans l’aspect apolitique de leurs revendications, en ce sens qu’il n’y a pas comme dans les années 1990 de théorisation marxiste du mouvement. Leur cible est claire : les banquiers, et spécialement ceux de Wall Street, qualifiés de « banksters ». Il n’y a pas non plus de leaders clairement identifiés au stade actuel.

Les pouvoirs politiques hésitent actuellement entre la tolérance ou la répression. En Espagne par exemple où une attitude « soft » des autorités a débouché lors des élections régionales sur une poussée de la droite, ce qui peut paraitre paradoxal. Aux Etats-Unis il y a eu deux attitudes : celle de Barack Obama plutôt compréhensive, celle des autorités de New-York plutôt répressive. On peut comprendre que dans un contexte électoral Obama soit incliné à la récupération, tandis que les républicains pencheraient plutôt pour la répression qu’ils supposent plus conformes au vue d’un électorat conservateur.

Ces mouvements visent non seulement la crise bancaire actuelle, mais plus largement les problèmes sociaux d’une partie importante de la population, qui n’est pas pour le moment elle-même mobilisée. Si la crise devait se prolonger et la pression des réformes visant l’Etat Providence s’accentuer, le mouvement pourrait s’organiser et prendre de l’ampleur, soit avec les mouvements syndicaux et politiques, soit sans eux et évoluer vers une radicalisation d’extrême gauche ou d’extrême droite.

Nous pencherions plutôt pour une évolution similaire à celles des pays de l’Est, c’est-à-dire une mobilisation calme et déterminée basée sur des réseaux sociaux et la répétition de manifestations (par exemple tous les lundis en RDA) de plus en plus massives avec un mot d’ordre unique de type : « WIR SIND DAS VOLK ».

Ce serait un signal clair adressé aux dirigeants : « Nous ne voulons pas détruire le système, mais nous ne voulons pas qu’il nous détruise ».

Lorsque M. Reynders et M. Trichet nous parlent de crise systémique, ils pensent essentiellement au système monétaire et financier. Mais comme nous l’avons montré la crise embrasse l’ensemble du système capitaliste libéral et du système politique de la démocratie représentative. Si les réformes de ce système sont devenues nécessaires, il faudra la volonté de les mettre en œuvre, c’est-à-dire de pallier l’absence d’autorité politique qui a caractérisé ces derniers mois; il faut bien dire que les élus et les élites se sont laissé porter par les événements et que jusqu’à présent personne n’a pu trancher le nœud gordien. Si cette heureuse issue se réalise, il faudra établir une autorité économique européenne efficace bien sur, mais surtout légitime car l’absence de celle-ci a été à l’origine de l’aggravation d’une crise maitrisable à ses origines. L’efficacité appartient à l’exercice de l’autorité, la légitimité appartient à un processus démocratique encore à inventer. L’accord trouvé aux aurores de ce 26 octobre sur le problème grec est un pas en avant positif, sans encore s’attaquer aux questions structurelles, mais les marchés vont se calmer quelques semaines. Cet accord s’est fait autour de 5 personnes (MM.Sarkozy et Juncker, Mesdames Merkel et Lagarde et un représentant des banques). Les institutions du Traité ne fonctionnant pas, une oligarchie s’est dégagée sous l’égide du condominium franco-allemand sous la pression des milieux financiers. Ni M. Van Rompuy, ni M. Barroso n’ont été invités? La maladie institutionnelle congénitale de l’UE apparait au grand jour. Et le citoyen? M. Reynders a dit que l’on mentirait si l’on disait que le citoyen ne sera pas impacté par cet accord. Dans un contexte d’incertitude macroéconomique, d’opacité sur la solvabilité et les liquidités des banques, d’inflation qui pointe, de contraction de la dépense publique et de taxes en hausse, de croissance plate, qui pourrait être optimiste sur la suite des évènements?

D’ un point de vue géopolitique l’Europe a perdu des points sur l’échiqier mondial dans un domaine ou elle aurait dû exceller. Alors que la Chine veut s’imposer sur le champ monétaire et financier mondial par des propositions de participations aux Fonds prévus,l’Europe saura-t-elle se ressaisir face à ce Cheval de Troie?

 C’est le dos au mur que l’Europe devra construire sa souveraineté budgétaire et poursuivre son intégration économique et financière dans un cadre confédéral souple (coalition des volontaires) et politiquement homogène, l’évolution naturelle vers le fédéralisme demeurant soumis à l’approbation des peuples .

La bonne finance sera le fruit de la bonne politique.